L'angoisse de l'après-bac

Si comme moi, tu es rendu à la fin de ton bac et que tu ne sais toujours pas dans quoi t’aventurer, tu lis le bon article. Tout d’abord, sache que je compatis et que je t’invite à une séance qui aura lieu jeudi prochain pour pleurer tous ensemble, main dans la main.

Mes intentions étaient de poursuivre en maîtrise à McGill. Le 20 janvier, de bonne humeur, je décide de m’y mettre. J’arrive sur le site, le choc! Je constate que la date limite pour les demandes d’admission était le 15 janvier. Génial! Dans mon cerveau encore « hangover » du temps des fêtes, je m’étais dit que la date limite (dans un monde normal) serait au début du mois de mars. Je fais rapidement mon deuil de faire partie de cette élite intellectuelle diplômée de McGill et je clique gracieusement sur le site d’une autre université. Le 1er février marque la fin de tout espoir d’avoir un avenir. Le temps de paniquer pendant quelques heures et de maudire le système d’éducation au Québec; je me reprends et je me penche vers les diverses options qui s’offrent à moi.

Mais je hurle! Une semaine pour préparer tout ce qu’il faut pour faire ma demande de maîtrise, ça ne sera jamais suffisant? Étant élue procrastinatrice de ma classe de secondaire 5, je me mets à penser à tous les obstacles impossibles. Cependant, je sais très bien que si ça m’importe réellement je ferai le nécessaire. Étape numéro 1 : choisir le programme de maîtrise approprié… Cette étape n’est pas sans réveiller en moi toutes sortes de remises en question. Est-ce vraiment nécessaire de faire une maîtrise? Il me semble que des millions de personnes sont tout de même relativement heureux sans études supérieures... On va se dire les vraies affaires, la seule raison qui nous pousse à exposer ce noble bout de papier dans un cadre cheap de Wal-Mart, est le regard admiratif de maman et papa et celui jaloux de tes cousins en région qui te visitent deux fois par année.

Bref, après moult recherches sur le sujet de ma maîtrise, mon attention se pose sur un diplôme d’études supérieures spécialisées « DESS ». C’est pas pire, non ? Ça se glisse bien dans une conversation. Ça se concentre sur le marché du travail et c’est presque aussi complet qu’une maîtrise, et tu n’es pas obligé de faire un mémoire! La recherche, c’est pas mon truc, donc ça tombe bien! C’est le programme qu’il me faut. OK je vais être encore honnête avec vous, c’est seulement parce que la date limite est en avril que cette idée me paraît géniale… Tout de même, ce qui est cool avec le DESS, c’est que tu n’as pas besoin de harceler 2 à 3 professeurs qui n’ont aucune « connaissance » de ton existence, pour te rédiger une lettre de recommandation. De plus, les frais d’éducation de cette option sont moins chers que la maîtrise! T’as un beau diplôme tout aussi respectable, au bout d’un an seulement. Ça te donne un sentiment de fierté, ça attise juste assez de jalousie, tes parents sont super contents que t’aies plus qu’un BAC et tout ça facile et économique! Je sens que j’ai frappé le jackpot du cursus universitaire. Le seul hic (le gros hic), c’est que le DESS te demande d’avoir au moins 2 ans d’expérience de travail. Mais je tiens à préciser qu’on ne parle pas de tes années d’expérience en gardiennage dans ton quartier du West Island. On parle ici de vrai travail dans ton domaine d’études. Donc, si je comprends bien, je dois avoir terminé mes études pour trouver un job qui a de l’allure; mais pour poursuivre mes études au niveau supérieur, il faut que j’aie eu un job qui ait de l’allure. J’applaudis sarcastiquement dans mon cœur.

 

Je re-revisite mes options post-baccalauréat et je réalise que je suis face à ma plus grosse phobie, à un spectre, une inévitable réalité qui se profile à l’horizon. Ce quelque chose que je crains de plus en plus, depuis ma dernière année universitaire, est maintenant face à moi. Ces mots qui me font trembler depuis ma tendre enfance : le « marché du travail ». Aujourd’hui, cette éventualité est une réalité. « J’ai entendu dire que ce n’était pas si pire », me dis-je. C’est pas si pire travailler tous les jours de la semaine. Le bon vieux 9 à 5… Ark! Regarder En Mode Savail en cognant des clous, épuisée de la journée que j’ai dans le corps. Me forcer à aller au gym au moins une fois semaine, au lieu de profiter de mes seuls moments libres pour faire quelque chose de plaisant. Écouter quotidiennement mes collègues banlieusards parler de jardinage en feignant un intérêt. Gérer le stress perpétuel de décevoir mon patron (parce que contrairement à l’école c’est lui qui me paie pour être présent). Je réalise que j’ai peut-être une image biaisée de la vie d’adulte. Qui plus est, je ne suis pas encore prête à me faire à l’idée que c’est peut-être pas si pire... Que je vais peut-être aimer ça, ou pire, commencer à jardiner! J’ai peur de me lancer sur le marché du travail, car j’ai peur de décevoir quelqu’un d’autre que moi-même.

Bref, pour conclure je crois que je vais simplement épouser un homme riche et devenir femme au foyer. Mais avec un homme de ménage pour la maison, je suis féministe, tout de même!