Tiktok a pour réputation de prendre un terme académique et de lui en donner une nouvelle définition. Un des plus récents exemples est le male gaze, le nouveau terme à la mode qui semble être aux lèvres de tous; parlons-en. Le male gaze est un terme qui prend naissance dans le monde du cinéma pour décrire les personnages féminins qui sont influencés par les valeurs patriarchales et sont ainsi sexualisés. Ces personnages sont souvent des caricatures des femmes qui ne mettent de l’avant qu’une seule de leurs facettes, soit le côté sexuel. On ne prend pas en compte d’autres caractéristiques et on voit le corps de la femme dans les médias populaires qu’à travers le regard de l’homme. Le corps est ainsi utilisé par les personnages masculins, il est vu comme une chose à regarder, à posséder ou bien même à utiliser pour ses propres gains; jamais rien de plus.
La représentation des femmes à travers le male gaze contribue au problème systémique que force la société patriarcale. Les représentations misogynes que cela implique font ressortir les réalités du quotidien des femmes tout en participant à ce même système qui les montre sous la lumière et le regard des hommes. L’objectification du corps féminin dans les médias influencent tout autant les femmes au quotidien. Des études démontrent que ceci peut augmenter les cas de dépression, d’anxiété, et même de baisse de l’estime de soi. Ce male gaze qui représente les fantaisies des hommes est constamment présent, dans les films que nous regardons, dans les livres que nous lisons et même dans la musique que nous écoutons; tellement présent qu’il s’internalise chez les femmes elles-mêmes. Nous sommes constamment bombardés des attentes qui ressortent du patriarcat, de cette idée qu’il faut continuellement être présentable, que ce male gaze finit par exister dans nous-mêmes. Margaret Atwood dit : « You are a woman with a man inside watching a woman. You are your own voyeur. » Les femmes dans leur quotidien peuvent se dire que nous sommes éloignées du patriarcat, mais il existe en nous-mêmes. Il faut consciemment déconstruire les valeurs misogynes qui nous ont été inculquées.
L’une des preuves les plus flagrantes de cette réalité est l’expérience des grandes célébrités féminines. Avec la récente sortie du documentaire de Pamela Anderson, on apprend beaucoup plus sur la vie privée de la star. Elle reflète sur son passé et parle du traitement qu’elle a eu, dans son interview avec Vogue. Elle a couvert les magazines Playboy, a été nommé comme sex symbol et a été victime d’un traitement horrible. Elle fut grandement sexualisée par l’industrie et par le public. Plusieurs ne la voyait que d’une dimension; elle mentionne notamment la misogynie à laquelle elle a fait face dans le passé et comment les interviews qu’elle faisait ne tournaient qu’autour de son corps et de ses partenaires. L’objectification et la sexualisation des personnages qu’elles jouaient se sont retransmises et reproduites dans la réalité. Le male gaze ne la permettait d’être vue que comme un objet de désir sexuel.
La manière dont on perçoit le corps féminin dans les films systématise d’autant plus le sexisme contre les femmes. Le patriarcat se propage dans toutes les sphères qui affectent notre quotidien. Lorsque nous réduisons l’existence de la femme à son corps dans les médias, on favorise cette même objectification dans la réalité. Il faut donc prendre conscience du poids que porte la notion de male gaze et de ce qui nous est appris, et le délaisser pour une prise de conscience plus poussée quant à la place de la femme en société.
Aminata Sall
Sources
https://www.vogue.com/article/pamela-anderson-netflix-documentary-memoir-interview
https://medium.com/@sienafroment/the-male-gaze-and-social-media-56a67528c428